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jeudi 21 septembre 2017
Quatre ans après son abdication, le temps peut commencer pour dresser un bilan du pontificat de Benoît XVI et délimiter les lignes de son héritage. Ce pape qui n’a jamais bénéficié d’une bonne presse a pourtant tracé un sillon profond dans l’histoire de l’Église. Ami et soutien de Jean-Paul II, son pontificat de huit ans ne peut se comprendre sans les vingt années passées à la Congrégation de la Doctrine de la foi et auprès du pape polonais. Benoît XVI laisse une œuvre considérable de textes, d’homélies, d’encycliques, de livres et d’interventions multiples qui le placent dans la catégorie des grands théologiens de l’histoire de l’Église. Ce pape timide, sans charisme apparent, a pourtant soulevé les foules lors de ses voyages, comme dans cette nuit d’orage et de pluie lors des JMJ de Madrid.
L’auteur consacre un chapitre à ce moment fondamental du pontificat de Benoît XVI, car il condense tout le paradoxe et toute la lumière de l’action du pape allemand. Empêché de parler à cause de la tempête, Benoît XVI est finalement resté silencieux, dans une longue adoration à l’égard du Saint-Sacrement. Ce pape qui a parlé et qui a aussi fait du silence de la prière une vertu cardinale, a affronté la tempête et a dû tenir ferme la barque de l’Eglise, exactement comme lors de cette nuit madrilène.
Christophe Dickès analyse longuement l’épisode inédit de la renonciation, montrant ce qu’il a fallu de courage à Benoît XVI pour proposer cet acte de rupture dans la tradition de l’Eglise, tout en analysant aussi les conséquences juridiques de celui-ci et le regard nouveau porté sur la papauté.
La fin du pontificat révèle l’ensemble de celui-ci. Ce pape que l’on a présenté comme réactionnaire et peu en prise avec son temps est pourtant l’un de ceux qui ont fortement réformé l’Église. Que ce soit l’apport possible de la renonciation, en s’appuyant sur le droit canonique, la poursuite de la pleine réforme liturgique, l’effort de modification des structures de la Curie, le soutien à une diplomatie pontificale innovante, notamment à l’égard de la Russie et du Moyen-Orient.
En relisant les textes et les productions théologiques de Benoît XVI, Christophe Dickès propose une nouvelle compréhension de ce pontificat dont l’apport est surement beaucoup plus important que ce qui en a été perçu de prime abord. En relisant le discours de Ratisbonne, on se rend compte que l’exigence de raison et de dialogue du Pape était la bonne. En se reportant à ses grands discours aux parlements d’Angleterre et d’Allemagne, on comprend mieux la pensée politique d’un pape qui n’a cessé de se préoccuper du futur de l’Europe et partant du monde.
Cet héritage expliqué est donc une forme de bilan. Bilan provisoire, car il reste beaucoup à connaître et à approfondir, notamment lorsque les archives seront ouvertes, mais un bilan qui, en dépit de la personnalité propre du pape Ratzinger, témoigne d’une grande continuité chez les pontifes du XXe et du XXIe siècle.
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