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lundi 20 février 2017
Si vous aimez l’histoire et les romans d’espionnage, vous serez captivés par le remarquable travail que Mark Riebling a consacré aux réseaux d’espionnage du Vatican pendant la Seconde Guerre mondiale. L’auteur a consacré dix ans d’enquête à ce sujet crucial pour comprendre le rôle de Pie XII pendant la guerre. Il a retrouvé des documents rares, des lettres et des échanges entre différents conjurés allemands, pour livrer une somme, publiée en 2015 aux États-Unis et fin 2016 en français.
Contre ceux qui croient encore au mythe du pape d’Hitler, Mark Riebling a démêlé les fils des réseaux construits par Pie XII afin de lutter contre le tyran. On y découvre que dès 1939, le Pape a organisé l’assassinat du dictateur allemand, s’appuyant sur des hommes décidés, quoique très minoritaires. L’ouvrage repose sur de nombreux documents et il est en plus très bien écrit, comme un roman d’espionnage où cette fois tout est vrai. Avec lui, on entre au cœur du Vatican et des services d’espionnage, on y découvre des hommes incroyables qui ont risqué leur vie, beaucoup sont morts, pour sauver l’honneur de l’Allemagne.
Parmi eux, l’amiral Canaris, chef du renseignement militaire allemand (l’Abwher), opposant de la première heure à Hitler qui reste à son poste pour fournir au Saint-Siège le plus de renseignements possibles. Protestant, Canaris n’a confiance que dans le Pape et c’est à lui, grâce à des intermédiaires, qu’il fournit des informations sur les atrocités commises en Pologne ainsi que les plans d’attaque contre la France et l’URSS. Il participe à de nombreux complots contre Hitler, dont celui du 20 juillet 1944, qui cause son arrestation et sa mort. On y découvre la figure imposante de Josef Müller, surnommé Jo le Bœuf, qui est l’un des principaux agents du Pape en Allemagne. Catholique de Bavière, opposant nazi de la première heure, il effectue de nombreux voyages à Rome, sous la couverture de l’Abwher et de l’amiral Canaris, pour transmettre les informations. Arrêté, il est sauvé in extremis avant de subir le peloton d’exécution et mène ensuite une carrière politique en RFA. Mgr Ludwig Kaas, passionné d’archéologie, qui conduit les fouilles pour retrouver le tombeau de Pierre. C’est dans la crypte de la basilique qu’il donne rendez-vous à ses informateurs pour échapper à la surveillance des espions nazis présents à Rome. Claus von Stauffenberg, principal artisan de l’attentat manqué du 20 juillet 1944, qui était en liaison étroite avec Pie XII.
D’autres portraits émergent dans cet ouvrage de fond, qui nous plonge dans les profondeurs de l’action secrète et de la lutte contre le régime nazi. On y découvre que Pie XII a personnellement supervisé plusieurs attentats contre Hitler et qu’il a été jusqu’à rédiger, sans les signer, des papiers d’encouragement à destination de la résistance allemande. Un geste fou, qui aurait pu mener à de terribles représailles et qui fait apparaître comme encore plus injuste les accusations de collaboration.
La stratégie de Pie XII est claire et établie dès avant le déclenchement de la guerre : rien ne sert de lutter directement contre Hitler, il ne renoncera jamais et cela ne fait que renforcer son aura. Il faut donc lutter souterrainement et secrètement. Pour ce faire, il faut développer un réseau de résistance en s’appuyant sur l’Allemagne honnête qui refuse le dévoiement opéré par le nazisme. Ces Allemands résistants se recrutent, pour l’essentiel, dans les rangs catholiques. Ils sont laïcs, officiers, prêtres et ils sont prêts à mourir pour renverser le tyran. De sa main, Pie XII rédige un mémento à destination de la résistance pour légitimer le tyrannicide à l’encontre d’Hitler. Un message qui lève les scrupules et galvanise les hommes, mais ô combien dangereux, d’autant que celui-ci manque de peu de tomber entre les mains de la Gestapo.
Le livre de Mark Riebling est remarquable. Écrit de façon très vive, il maintient un véritable suspense qui amène à dévorer les 400 pages. On y découvre des hommes éminemment courageux, au milieu de la bassesse de tant d’autres qui ont collaboré sans scrupules avec le régime, traquant les résistants, torturants et commettant de nombreux meurtres. Outre l’hommage rendu à Pie XII, c’est aussi une œuvre de justice pour tant de ces figures de la résistance tombée dans l’oubli, mais qui, si elles ont échoué sur le court terme, ont sauvegardé l’honneur de l’Allemagne.
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