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samedi 26 janvier 2019
Un article de Gérard Bramoullé, réflexion sur la démocratie et les villes.
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La notion d’intérêt général est fréquemment invoquée par les hommes de l’État pour justifier leurs actions, surtout quand elles sont discutables. Son évocation est un argument ultime, rendant difficile la poursuite des débats au nom des bons sentiments altruistes qu’elle est censée représenter. Cette utilisation rhétorique est facilitée par le flou d’n concept qui n’a pas trouvé d’ancrage solide. La vision de Rousseau (la « volonté générale ») ne permet pas de différencier l’intérêt général de la despotique raison d’État. Quant à la vision utilitariste cherchant à maximiser une utilité collective, elle bute sur l’aporie bien connue des économistes : l’impossibilité logique de faire des compensations interpersonnelles d’utilité du fait de leur subjectivité. L’intérêt général est ainsi typiquement un « faux concept » au sens d’Ayn Rand, s’appuyant sur le dépassement des intérêts particuliers, et donc sur la négation de l’individu.
Cela dit, ce faux concept est présent dans le droit public français où, s’il fait figure d’exception nationale, il n’en est pas moins un pilier du droit positif. Il se retrouve en effet comme critère déterminant des décisions des plus hautes juridictions telles que le Conseil d’État et le Conseil Constitutionnel. Lorsque les individus veulent, par exemple, contester une loi, ils peuvent lancer une question prioritaire de constitutionalité ou QPC ; celle-ci est transmise dans un premier temps au Conseil d’État, lequel peut ou non la transmettre au Conseil Constitutionnel au vu de son appréciation de la validité des arguments avancés. Une application récente de cette démarche illustrant le contenu et les conséquences de la référence à la notion d’intérêt général se trouve dans les débats autour de la création de la métropole Aix Marseille Provence – AMP.
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